35
Il serait vain de
chercher à établir, à travers les rapports, les citations, les comptes rendus
militaires, une différence quelconque entre les 2e et 3e régiments de chasseurs parachutistes.
Leurs missions se
ressemblaient. L’héroïsme, l’énergie et la rage avec lesquels ils les
accomplissaient étaient jumeaux, le pourcentage de réussite et d’efficacité
sensiblement égal, et pourtant, les rares officiers de liaison ou autres
observateurs qui eurent l’occasion de séjourner dans l’une ou dans l’autre de
ces deux unités eurent tous la surprise de se trouver dans deux mondes
différents.
Le 2e R.C.P. était
en majorité formé par des natifs de la moitié nord de la France. Enormément de
Bretons, beaucoup de gars du Nord et de l’Est, auxquels s’ajoutaient quelques
Gascons et une poignée de Basques. Le 3e R.C.P., créé en Afrique du
Nord, avait, lui dans ses rangs 80 p. 100 de Français d’Algérie, de
nombreux Corses ; dans sa presque totalité, il était composé de
Méditerranéens.
Les parachutistes y
parlaient le pataquès coloré de Babel-Oued dans lequel les plus grossières des
interjections forment des images qui portent à sourire et, bien souvent, la
chaleur passionnée de leur langage obscène, ordurier et trivial, les aida à
souffrir et à mourir.
Aube du 15 août. La
section de commandement du capitaine Fournier arrive à la ferme des Deux-Chênes.
Le capitaine a repéré de loin les bâtiments isolés. La position est idéale. La
ferme est en léger surplomb ; la végétation tourmentée permet une fuite
éventuelle de tous côtés.
Les Deux-Chênes sont
situés à quelques kilomètres de Bressuire, en bordure du « Bois Vert ».
La ferme est gérée par
un couple entre deux âges, de solides cultivateurs. L’homme comme la femme
reçoivent les parachutistes dans une chaleur sincère ; pas un instant leur
bonne foi n’est mise en doute, d’autant que les fermiers abritent déjà deux
résistants.
Les hommes qui forment
la section de commandement du capitaine Fournier sont : l’adjudant
Montagnac, Michel Alabi, Denis Kraft, Maurice Faroudja, Robert Masarelas. Tous
les cinq sont des Pieds-Noirs. Dominique Poli, lui, est Corse, Pierre Schmitt, Alsacien.
L’équipe vient d’essuyer
de nombreux coups durs, les hommes sont fourbus. Fournier décide d’installer
son P.C. à la ferme jusqu’à nouvel ordre.
La principale activité
des nombreuses unités allemandes qui demeurent encore dans la région semble
maintenant être axée sur la fuite au nord-est. Mais il faut se garder de
relâcher la vigilance, l’ennemi demeure combatif, non seulement pour protéger
sa retraite, mais aussi pour assouvir sa haine et son humiliation.
Aux Deux-Chênes, le
ravitaillement est abondant, les chambres nombreuses, la grande salle du
rez-de-chaussée fraîche et accueillante. Le havre a une odeur de quiétude et de
vacances.
« Des petits rois, voilà
ce qu’on est, des petits rois ! » déclare Alabi en se débarrassant de
ses bottes de saut et en massant ses pieds endoloris.
Le capitaine Fournier s’est
retiré dans un coin avec le régisseur de la ferme et les deux résistants. Ce
sont deux frères, Jean et Lucas Germain.
La fermière, une femme
solide qui doit friser la soixantaine, a préparé une bassine de café au lait. Elle
a disposé, sur la table, du pain, du beurre salé et s’occupe à faire cuire des
œufs ; gentiment, mais fermement elle a refusé toute aide proposée spontanément
par les parachutistes.
« Occupez-vous de
faire la guerre et laissez-moi faire la cuisine », a-t-elle déclaré.
Tous les huit se sont
installés sur des bancs grossiers le long de la longue table rustique. Ils
ressemblent davantage à des collégiens chahuteurs qu’aux implacables soldats qu’ils
sont.
Passant derrière chacun
d’eux, la fermière verse dans de grands bols le café crémeux. Elle passe
ensuite les assiettes qui chacune contiennent deux œufs qui continuent à
grésiller dans le beurre bouillant.
« Ma mère, si tu voyais
ton fils ! » clame Alabi qui ajoute aussitôt : « Elle croit
qu’il fait la guerre, la malheureuse ! »
Ils s’expriment tous
dans cet accent tellement chantant et convaincant que la plus insignifiante des
banalités explose comme le plus brillant des traits d’esprit.
Au passage, Kraft enlace
la fermière par la taille et lui dit :
« Quel dommage que
vous soyez déjà mariée ! Une femme comme vous, j’en rêve depuis l’école
maternelle !
— Arrêtez vos
sottises, réplique la brave femme en lui donnant une claque amicale sur la main,
mais dans son sourire on devine qu’elle a quand même apprécié le compliment.
— J’espère que vous
ne vous formaliserez pas trop, madame, intervient Fournier de l’autre bout de
la pièce. Mes garçons sont un peu turbulents.
— Ne vous inquiétez
pas, capitaine ! Avec la Résistance, ça va faire bientôt trois ans que ça
passe et que ça repasse. On a pris l’habitude.
— Bon, reprend
Fournier, s’approchant du téléphone. Nos amis Jean et Lucas viennent de m’informer
qu’un train blindé se trouve en gare de Bressuire en instance de départ dans la
direction de Poitiers, dans l’espoir évident de gagner le nord de la Loire. Il
transporte de nombreux blindés et un armement considérable. L’effectif du
convoi est composé de trois compagnies de pionniers et de deux compagnies de
Waffen S.S. La ligne Bressuire-Parthenay qu’il va emprunter passe à huit cents
mètres d’ici.
— Y en a plus !
bafouille Faroudja, la bouche pleine.
— Qu’est-ce que tu
dis, Michel ? »
Faroudja avale et essuie
sa bouche d’un revers de manche.
« Je dis : y
en a plus, mon capitaine. Ils sont tous morts. Je finis mes œufs et j’y vais. Y
a plus de pionniers, plus de S.S., je m’en charge tout seul.
— Écoute-le
celui-là, intervient Masarelas, écoute-le. Rien qu’une mouche, elle lui fait
peur, et il veut nous jouer les terreurs.
— À moi, tu dis ça,
Robert ? À moi tu dis que rien qu’une mouche, elle me fait peur ? Ma
parole, je vais te tuer.
— Toi, tu vas me
tuer à moi ? Là, putain, mais cinq mille il en faudrait des comme toi pour
me tuer à moi. Et encore, si j’avais les mains attachées. »
Le ton est tellement
sincère, l’accent si convaincant, l’indignation tellement bien feinte, que les
fermiers et le régisseur montrent des visages inquiets. Fournier les rassure d’un
sourire.
« Vous vous y ferez
si nous restons quelques jours. Ils passent leur vie à échanger les pires
insultes. C’est leur façon de se défouler. Ils tiennent ça des Arabes, ils les
admirent tellement qu’ils les imitent en tout.
— Aïe ! Aïe !
Mon capitaine, ça recommence, se lamente Alabi. Mais laissez-les tranquilles
ces putains de melons.
— Qu’est-ce que les
melons viennent faire dans cette histoire ? interroge, intrigué, Lucas
Germain.
— Vous apprendrez
tout ça, explique Fournier. Depuis que l’on m’a confié cette compagnie, j’ai
dénombré plus de soixante appellations diverses que mes hommes emploient pour
désigner les musulmans. Les melons, les dindons, les troncs, les ratons, les
biques, et pas une seule fois je n’ai entendu prononcer l’un de ces quolibets
sans qu’il ne soit précédé de l’épithète putain. »
L’accent change, mais le
ton et l’esprit demeurent. C’est Dominique Poli, le Corse, qui s’est levé, en
déclarant dans une intonation traînarde et ronronnante :
« Et le train, alors ?
Y va passer pendant que vous déconnez.
— Oh ! Napoléon,
étouffe-toi, tu veux ? Qu’est-ce qu’il va pas nous donner des leçons, ce
curé maintenant !
— Napoléon, il vous
emmerde. S’il avait eu que des gars comme vous dans la Grande Armée, il aurait
pas fait la guerre, il aurait monté un cirque.
— Maintenant, suffit,
tranche Fournier. Écoutez-moi.
Ce train, il ne faut pas
l’immobiliser définitivement. Sinon les S.S. deviendraient fous de rage et se
répandraient dans la région, et le pire serait à redouter. Pourtant il ne faut
pas laisser à ce convoi la moindre chance de passer, nous devons le freiner. Alors,
voilà. On va lui faire péter la voie sous le nez autant de fois que ça s’avérera
nécessaire. Les pionniers répareront, c’est leur métier, et les S.S. attendront.
Dès que le train reprendra sa route, nous referons péter la voie quelques
kilomètres plus loin et ainsi de suite. Il est essentiel de laisser aux Boches
l’espoir que chaque sabotage est peut-être le dernier. Nous irons, deux par
deux, installer les charges explosives, les gus resteront à l’affût et
déclencheront le dispositif dès que le convoi s’approchera. Entre Bressuire et
Parthenay, le terrain se prête parfaitement à ce genre d’opération. »
Ce sont l’adjudant
Montagnac et Maurice Faroudja auxquels est revenu l’honneur d’ouvrir le bal. Quelques
minutes leur suffisent pour installer la charge. Ils se tiennent embusqués en
surplomb dans les bois.
Vers 15 heures, le
convoi arrive lourdement. De la position qu’ont choisie les parachutistes et, compte
tenu de la lente progression du convoi, les deux hommes aperçoivent le train
blindé alors qu’il se trouve à plus de cinq minutes d’eux. Faroudja se
précipite sur la voie, règle le dispositif de retardement, et rejoint en
courant le sous-officier.
Les deux parachutistes s’éloignent
de huit à neuf cents mètres, puis trouvent un arbre dans lequel ils grimpent et
duquel ils peuvent observer à la jumelle la bonne marche de leur entreprise.
L’explosion déchire les
rails sur cinquante mètres. Les traverses voltigent comme des fétus de paille. Il
est évident que le sabotage a été perçu des passagers du train.
Lorsqu’un bref instant
plus tard le convoi apparaît, il traînaille au pas comme un gros mollusque et s’immobilise
sans difficulté avant la brèche.
Hurlant, vociférant, un
major de la Waffen S.S. court le long de la voie, suivi d’une dizaine d’officiers
et sous-officiers.
Beaucoup plus calme, un
colonel des pionniers apparaît et, accompagné de plusieurs spécialistes, se
rend sur les lieux du sabotage.
Le major S.S., ne
sachant sur qui repasser sa colère, s’en prend à l’officier du Génie qu’il
insulte malgré l’infériorité de son grade. Le colonel semble s’en foutre
éperdument. Ignorant l’excité, il distribue des ordres aux pionniers qui se
mettent instantanément au travail.
Dans leur arbre, l’adjudant
et Masarelas jubilent.
« Même s’ils
travaillent toute la nuit, ils ne pourront pas réparer avant la fin de la
matinée prochaine, déclare en technicien l’adjudant Montagnac. On peut rentrer
tranquillement.
— Restons encore un
peu, tu veux ! Ma parole, c’est trop marrant. Regarde, regarde, s’il
gueule, ce con ! Il est comme un fou, dis, comme un fou… Qu’il est rigolo,
ce guignol, c’est pas possible ce qu’il est rigolo…
— Allez, Robert, tu
reviendras. Le capitaine il a dit de ne pas traîner. »
À la ferme, le rapport
imagé et amplifié de Masarelas plonge ses compagnons dans l’allégresse. Fournier,
comme d’habitude, écoute, amusé. Il est certain que l’opération est un succès
sans faille ; pour le reste il y a longtemps qu’il a appris à faire la
part des choses.
« Ma parole, un
général de S.S., explique Robert. Bardé de décorations qu’il était, Croix de
fer, tête de mort, tout le bouzdir… Dans les deux mètres de haut il mesure, et
la gueule mauvaise, mauvaise. Alabi, rien qu’il le voit, il meurt.
— Va te faire niquer,
va ! jette, indifférent, Alabi.
— Bon, décide
Fournier, demain matin, Poli et Kraft. Pour les autres, repos.
— La vie de château,
conclut Masarelas, une petite promenade quotidienne et retour à la maison comme
de petites cailles. »
Le lendemain, la scène
se répète.
Après avoir travaillé
près de vingt-quatre heures consécutives, les pionniers ont regagné le convoi
qui s’est prudemment engagé sur les rails bricolés. Le train n’a même pas eu le
temps de prendre sa vitesse, il a parcouru exactement deux kilomètres sept cent
avant que les mécaniciens ne perçoivent devant eux la nouvelle explosion.
Cette tragi-comédie va
durer huit jours pendant lesquels le train ne parcourra que les vingt-sept
kilomètres qui séparent Bressuire de Parthenay.
Pendant les quatre
premiers jours, une effervescence enthousiaste va croître chez les
parachutistes, tandis que les Allemands vont porter leur colère à leur
paroxysme. Puis, curieusement, dans un camp comme dans l’autre, on va se lasser
des réactions passionnées.
Chez les Français, le
jeu va devenir routine, de leur côté les Allemands vont subir avec le stoïcisme
que donne l’habitude. Un écœurement blasé va faire place chez eux à l’indignation
et à la colère.
De la ferme, on part « faire
sauter le train blindé », comme on irait aux fraises ou aux framboises. En
rentrant, on ne raconte même plus ses exploits ou les réactions suscitées chez
l’ennemi, ce sont maintenant toujours les mêmes.
Le 23 août, le train
arrive enfin en gare de Parthenay. On est à la veille de la Libération de Paris,
il n’est plus question pour le convoi d’espérer passer la Loire. Alors, écœurés,
découragés, abattus, excédés par leurs efforts négatifs, les Allemands dirigent
le train blindé sur une voie de garage et, eux-mêmes, ils le piègent et le font
sauter. Puis, en deux colonnes séparées, les soldats vaincus prennent à pied la
route du nord-est qui ne peut plus les conduire qu’à la captivité.
Vingt-cinq ans après, les
Pieds-Noirs de la section de commandement du capitaine Fournier en rigolent
encore.
Quelques jours avant l’affaire
du train blindé, à la tombée de la nuit, une patrouille dépendant de la
compagnie Fournier vient de réaliser qu’un piège géant se referme sur elle. Les
hommes du 3e R.C.P. se terrent dans les bois d’Anjou d’où ils ne
sortent que la nuit pour effectuer des sabotages et tendre des embuscades. L’aspirant
d’Azermont les commande. Ils sont neuf : Méda, Verchère, Monteil, Vercherie,
Andrieux, Gosselin, Hourdebaigt, Germain et Jaillette.
Les S.A.S. ont entendu
et compris qu’un énorme dispositif allemand encerclait la forêt. Il est
impensable d’envisager une fuite : 1 100 S.S. s’apprêtent à
entreprendre une battue dans le bois d’Anjou.
Les parachutistes
cherchent une position de laquelle ils pourront se défendre, fixer l’ennemi
avec le plus d’efficacité, tenter de lui infliger de lourdes pertes avant de
succomber.
Le bois d’Anjou, au cœur
du bocage vendéen, n’offre aucune déclivité de terrain. Les seuls abris
possibles sont constitués par des taillis sous futaie, un véritable maquis dans
lequel on peut aisément se dissimuler.
D’Azermont et ses hommes
décident de se terrer et d’attendre.
Le jour tombe. Les S.A.S.
se sont disposés à plat ventre à quelques mètres les uns des autres. Anxieux, sans
rien voir, ils suivent de l’ouïe la progression du dispositif ennemi.
Le cercle se resserre
inexorablement. Ies parachutistes entendent maintenant nettement les ordres ou
les consignes criés dans les rangs des S.S. qui battent les futaies, violent la
forêt mètre carré par mètre carré.
Dans cinq minutes tout
au plus, ils vont être découverts. Jaillette rampe jusqu’à l’aspirant et
chuchote :
« On les laisse
approcher davantage ?
— Non, il faut y
aller. Feu à volonté, j’allais donner l’ordre. »
Jaillette rampe encore
de plusieurs mètres en direction du rideau serré des Allemands qui fouillent
inlassablement chaque buisson. Le parachutiste lance, coup sur coup, deux
grenades qui atterrissent et explosent efficacement. Puis, en trois bonds, il
se replie et rejoint ses compagnons.
Méda s’est allongé sur
le dos et, tenant son fusil mitrailleur à bout de bras, tire au hasard. Vercherie
et Hourdebaigt, qui eux aussi sont servants d’un F. M., adoptent la même
tactique. Les trois armes crachent à l’aveuglette, mais leur faisceau boucle le
cercle.
Les Allemands décrochent
prudemment à la recherche de positions abritées. Ils n’ont aucune raison de
forcer les choses, ils sont parvenus à leur but : localiser le groupe de
parachutistes qu’ils savent d’un effectif considérablement inférieur au leur. Ils
n’ont aucune raison de prendre le moindre risque.
Seulement, la nuit est
tombée. Et dans leur recul prudent, les S.S. ont élargi le cercle ; ils
devinent où sont les parachutistes, mais sont incapables de les situer avec
suffisamment de précision pour tirer au but. Alors, eux aussi tirent au hasard.
Les trois mitrailleurs
français s’apprêtent à riposter, quand d’Azermont, d’un bond de chat, rejoint
Méda.
« Ne tirez pas !
C’est ce qu’ils souhaitent pour nous situer. »
L’aspirant rampe jusqu’aux
deux autres servants et leur transmet la même consigne.
Les dix hommes se
retournent sur le dos et suivent dans la nuit la course des balles traçantes. Au
bout d’un instant, ils réalisent le miracle : les balles passent au-dessus
d’eux, les Allemands se prennent mutuellement pour l’adversaire, ils sont en
train de se tirer dessus entre eux.
« C’est trop beau, chuchote
l’aspirant, si ça pouvait durer. »
Ça va durer au-delà des
espérances les plus optimistes : pendant la nuit entière, les S.S. vont
poursuivre leurs échanges meurtriers.
À 5 heures du matin, d’Azermont
décide qu’il faut tenter une sortie, profiter de la surprise et bondir tous
ensemble en force à coups de fusils mitrailleurs et de grenades. Mais pour que
l’entreprise ait la moindre chance de succès, il faut parvenir à s’approcher au
maximum sans être découvert.
En rampant, les dix
parachutistes quittent leur gîte et forment une chenille humaine qui progresse,
silencieuse et attentive.
D’Azermont rampe en tête.
Il est prêt à bondir à chaque instant. Il se meut en se servant des coudes, serrant
une grenade dégoupillée dans chaque main. Mètre par mètre, il avance, suivi de
ses hommes ; il avance jusqu’à constater l’évidence : ils sont passés
à travers le dispositif.
Alors, les parachutistes
accélèrent la cadence. Ils continuent de ramper, mais moins prudemment, puis se
relèvent et se lancent dans une course folle. Tous avaient des grenades dégoupillées
à la main ; ils refixent les cuillers à l’aide de fils de fer, puis
reprennent leur course. Loin derrière eux, ils entendent la fusillade qui ne s’est
pas calmée un seul instant. La patrouille n’a même pas un blessé et, juste
avant l’aube, elle parvient à trouver un abri dans une ferme.
Dans la nuit, les S.S. s’étaient
entre-tués. Au lever du jour, ils dénombraient 87 morts et 182 blessés, chiffres
fournis par un rapport officiel allemand qui faisait état d’une force ennemie
considérable dans le bois d’Anjou. Le rapport proposait en outre plusieurs
sous-officiers pour une distinction.